World’s End Club (version physique, v1.0.3, sortie le 28 mai 2021), Développeur: Izanagi Games, Éditeur: NIS America
Fruit de l’imagination de Kotaro Uchikoshi (Zero Escape) et Kazutaka Kodaka (Danganronpa), World’s End Club a connu une genèse assez compliquée puisqu’il est tout d’abord sorti sur Apple Arcade en 2020 avec une histoire scindée en deux, la suite étant encore attendue à ce jour (printemps 2021). La bonne nouvelle, si vous jouez pour la première fois à World’s End Club sur Nintendo Switch, c’est bien évidemment que la console hybride de Nintendo accueille la version intégrale de l’expérience, pour le plus grand plaisir des joueurs…
Evoquer le scénario n’est pas une chose aisée puisque l’histoire est émaillée de rebondissements qu’il serait injuste de vous gâcher. Vous incarnez les personnages du “Club des battants”, un groupe d’élèves venus des quatre coins du Japon qui se retrouve enfermé dans un étrange parc d’attractions lors d’une excursion scolaire. Là, il vous est proposé (ou plutôt imposé) de participer à un “jeu de la survie” dont un seul élève peut sortir vainqueur à la fin du temps imparti (1 heure). Chacun d’entre eux a un objectif à remplir sans savoir lequel puisque les bracelets contenant les instructions ont été distribués aléatoirement, ce qui donne lieu à pas mal d’imbroglios.
Notez tout de même que ce n’est pas le coeur du titre, mais plutôt un didacticiel subtilement amené: vous découvrirez assez rapidement les différents types de gameplay qui vous attendent au fur et à mesure de vos aventures. D’ailleurs, l’écran titre n’apparait qu’au bout de 1h30, une durée nécessaire pour commencer à comprendre les tenants et aboutissants de l’intrigue (mais ne rêvez pas trop, l’histoire conservera de grandes zones d’ombres jusqu’à sa conclusion). Sachez tout de même qu’il sera question de trahison, de chagrin, mais également d’amitié, avec un petit côté Shonen lorsque les élèves se surpassent pour découvrir leurs pouvoirs (oups, mini spoiler). Ces derniers n’ont pas tous le même niveau d’intensité mais c’est toujours amusant de découvrir ce type d’aptitudes (appelées compétences partenaire).
Le gameplay vous propose pas mal de chemins pour ramener votre équipe à Tokyo (qui se trouve à 1200km de votre point de départ) et il sera possible de revenir en arrière (voire obligatoire suivant certaines fins) pour découvrir de nouveaux embranchements. Comme évoqué plus haut, vous serez en charge d’un groupe de 12 enfants (sans compter un rat qui semble vouloir joindre votre équipe à un moment) et même s’il vous sera imposé de jouer avec la plupart d’entre eux, sachez qu’une grande partie de l’aventure vous mettra aux prises avec Reycho, le leader du Club des battants, et ses lancers magiques. L’histoire se permet aussi de séparer la bande en plusieurs groupes à certains moments du jeu: à vous de décider quelle troupe vous rejoindrez, sachant que les retrouvailles seront ensuite l’occasion de découvrir des anecdotes sur ce qu’il s’est passé par ailleurs.
Et s’il faut tout de même admettre que le jeu bénéficie d’une patte graphique hors norme et plutôt classe (le chara-design de certains personnages est à tomber), il faut également noter que certaines phases de gameplay souffrent d’une jouabilité assez quelconque. En effet, outre le côté Visual Novel où vous devrez discuter avec tout le monde et parfois prendre des décisions (il faudra même être rapide dans certaines situations), une autre partie du jeu se déroule sous la forme d’un jeu de plateforme saupoudré d’action où vous devrez résoudre des puzzles assez simplistes (souvent en utilisant des pouvoirs nouvellement acquis/découverts). Malheureusement, certains de ces pouvoirs manquent de précision dans leur utilisation (notamment le lancer de Reycho) et la partie plateforme est également assez scabreuse, notamment dans sa gestion des sauts (horizontaux comme verticaux). Ce type de désagréments risque de déclencher bon nombre de “game over“ chez les joueurs (entre les problèmes de maniabilité ou les effets de surprise), mais heureusement, les temps de chargement sont assez rapides et vous ne reprendrez jamais trop loin…
Il faut également saluer la traduction française qui a bénéficié d’un soin tout particulier, avec un florilège de références qui devrait vous décrocher quelques sourires (il y a même des répliques du type “La question elle est vite répondue”). Parmi les nombreux éléments à collecter, il y a par exemple un autocollant baptisé Kahiédeuklass qui correspond à un monstre-cahier fou furieux qui dessine des graffitis sur le visage de ceux qui l’ouvrent: c’est loufoque et cela contribue à l’atmosphère décalée du titre qui s’en sort grandi avec cette traduction de qualité. C’est plutôt rare chez NIS America et j’espère que les retours seront positifs (à minima sur ce point), histoire que l’éditeur continue ses investissements au niveau des localisations (même si le passage par la case Apple Arcade en amont a dû bien aider pour financer cette partie).
Au final, World’s End Club est un véritable phénomène qu’il est bien difficile de classer, car ce n’est pas vraiment un Visual Novel (malgré ses nombreux dialogues), ni un jeu d’action-plateformes, et il serait trompeur de se limiter au synopsis officiel du titre. Si le parti pris artistique ne plaira pas à tout le monde, il faut tout de même reconnaitre une certaine cohérence dans l’ensemble et pour ma part, j’ai totalement adhéré à la proposition. En revanche, il faut bien avouer que les phases de gameplay auraient mérité plus de précision et plus de profondeur car en l’état, on est plutôt face à des parcours et des puzzles enfantins, doublés d’une prise en main pas toujours très fine. Mais soyons honnêtes, lorsque vous arriverez à la fin de la première partie du jeu tel qu’il était sur Apple Arcade (c’est-à-dire avec un énorme cliffhanger), vous serez heureux de pouvoir enchainer directement avec la suite des aventures du Club des battants: le titre a beau être frustrant par moment, il s’en dégage un je-ne-sais-quoi qui vous poussera à revenir encore, et encore…